Le ministère mauritanien de l’Agriculture a souligné que la première expérience à grande échelle de culture du blé a porté ses fruits en mars 2024 dans la commune de Rosso, dans la région du Trarza. Il a aussi informé que cet essai est le fruit d’un partenariat entre le secteur public et deux sociétés privées agricoles. Une excellente nouvelle pour ce pays qui importe la quasi-totalité de son blé.
A l’en croire, l’essai à grande échelle consistait à cultiver deux variétés de blé sur 200 hectares de sols sablonneux dans la commune de Rosso. Entre 4 et 5 tonnes de blé par hectares ont été obtenues, a renseigné le ministère de l’Agriculture.
Pour le délégué régional du ministère de l’Agriculture dans le Trarza, c’est un résultat prometteur et encourageant pour ce pays importateur. Isselmou Ould Sid El Moktar a aussi souligné que cette nouvelle expérience prouve une fois de plus que la culture de blé est rentable, précisant qu’avec l’accompagnement soutenu des pouvoirs publics et l’investissement du secteur privé, la Mauritanie pourrait couvrir ses besoins en blé comme c’est presque le cas aujourd’hui avec le riz.
« Les exigences en terre et en eau sont favorables. Le blé, c’est moins contraignant que la culture de riz, moins coûteux en termes d’eau, c’est nouveau, il n’y a pas beaucoup de maladies… L’État a fourni un appui aux investisseurs. La stratégie de l’État à l’époque privilégiait le riz, je pense que maintenant, il s’engage pour cette culture et je pense qu’il va continuer ou augmenter l’appui. Car on a besoin de ces céréales », a-t-il estimé.
Le délégué régional précise que pour mener à bien cette expérience, l’État mauritanien a multiplié les aides : à travers la fourniture d’engrais, le désenclavement de la zone, la protection des cultures ou encore l’électrification des zones de production. « Un investissement nécessaire et stratégique pour l’approvisionnement du pays », selon Isselmou Ould Mohamed Taleb, économiste et statisticien qui a rappelé le contexte international, notamment depuis l’expiration en juillet dernier de l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes. Selon la dernière note trimestrielle de 2023, la Mauritanie y importait 1/5ème de son blé.
Le défi de la rentabilité
« Le blé est certes une denrée stratégique pour la Mauritanie, explique-t-il, on prend moins de risques avec les évènements internationaux. Mais le riz était pendant de nombreuses années en Mauritanie subventionné, les intrants aussi. Est-ce que cultiver du blé va être aussi rentable que cultiver du riz ? Le prix du blé est nettement plus bas que le prix du riz sur les marchés et il y a aussi la concurrence du blé extérieur », a renchéri l’économiste Isselmou Ould Mohamed Taleb, précisant que cette nouvelle culture est un pari.
« Il faudra beaucoup de temps pour d’abord avoir une main-d’œuvre qualifiée. Il y a aussi ceux qui sont propriétaires fonciers, qui n’ont pas les moyens de mettre en valeur et en plus, il faudra s’assurer que le marché sera un marché avec un pouvoir d’achat suffisant. Mais ça pourrait marcher », a dit M. Taleb qui a par ailleurs espéré que cette volonté de cultiver du blé perdura malgré les défis.
La Mauritanie a importé plus de 75 000 tonnes de blé d’une valeur de 322 millions de dollars sur le marché international en 2022, selon les données de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).