Adama N’Gaidé écrit depuis New York au Président Ghazouani pour sauver la "Belle Mauritanie"

Résident aux Etats Unis d’Amérique, plus précisément à New-York, notre compatriote Adama N’Gaidé, vient d’adresser une lettre, qui n’est pas la première du genre, après une précédente tombée sur le bureau de l’ex Président Mohamed Ould Abdel Aziz, à l’actuel Président de la République en fin de mandat Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani.

Adama énumère dans son courrier à l’homme fort, huit mesures à prendre d’urgence sur un éventail de problèmes immense et de périls énormes.

Il cite ainsi la revendication des mauritaniens victimes des années de braises de la lumière sur les exactions des années 80-90 non encore élucidées, la priorité à accorder à la réforme de l’école loin de l’arabisation suicidaire, la nécessité de réviser la constitution et de prendre des mesures renforçant la part des langues nationales dans l’audiovisuel public et privé, l’état civil et le patrimoine culturel

 

Ci-après l’intégralité de cette lettre ouverte :

 

Lettre ouverte au Président de la République Mohamed Cheikh El Ghazouani

Au nom d'Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux

 

Mr le Président,

 

Allah dit dans le saint Coran : "Ô hommes ! Craignez votre Seigneur qui vous a créés d'un seul être, et a créé de celui-ci son épouse…” (al-Nisā’, Verset 1). La personne qui vous écrit est profondément indignée comme l’est la majorité écrasante des Mauritaniens. Je suis indigné à cause de l’hypothèque qui pèse sur le présent et le futur de la Mauritanie.

 

Mauritanien, je me fais l’obligation de vous adresser cette lettre comme je le fis auparavant à l’endroit de votre prédécesseur.

 

Mr Le Président,

 

Je vous adresse cette lettre pour vous demander d’agir afin de sauver la belle Mauritanie. Oui la belle Mauritanie. Belle par sa diversité culturelle que les politiques cherchent vainement à éliminer ; Belle par son paysage naturel, ses ressources naturelles et sa position géographique.

 

Cette Mauritanie est belle car, liée par le sang, à ses pays voisins que sont le Sénégal, le Mali, l’Algérie, le Sahara et le Maroc ; Liens que les gouvernements successifs cherchent obstinément à anéantir.

 

Cette Mauritanie est aussi belle grâce à l’immense intelligence de ses filles et de ses fils forcés à la fuir dans l’espoir de se faire une vie sous d’autres cieux. Hélas, toutes les politiques conçues depuis votre arrivée au pouvoir, greffées à celles inventées par vos prédécesseurs, visent à extraire toutes ces beautés pour lui substituer une arabisation qui a généré une cohabitation porteuse de scenarios très pessimistes.

 

Mr le Président,

 

Le Mauritanien qui vous écrit est un homme de paix qui souhaite que son pays vive la stabilité et la justice. Malheureusement, la Mauritanie que vous avez la chance de diriger, est minée par des problèmes extrêmement graves qui se sont exacerbés dont vous n’ignorez pas l’ampleur encore moins la dangerosité.

 

Ayez la générosité de nous écouter et surtout de nous entendre mais surtout de prendre des décisions révolutionnaires seules à mesure de générer des transformations profondes dans notre société. Vous rendrez un immense service à vous-même, a l’ensemble des aux mauritaniens et aux futures générations mais aussi à l’Humanité. Ayez le courage de faire marche arrière en renonçant, entre autres, aux politiques discriminatoires qui sévissent dans tous les secteurs.

 

L’accumulation des injustices et des iniquités placent la Mauritanie sur pente extrêmement dangereuse et il vous revient, en tant que premier magistrat, de trouver des solutions aux contentieux graves qui polluent le paysage socio-politique. Je suis convaincu qu’une simple volonté exprimée suivie d’actes concrets d’apaisement trouvera des preneurs car les Mauritaniens sont, dans leur majorité écrasante, disposés et preneurs de toutes les initiatives qui sauvent le pays.

 

Mr le Président,

 

Le règlement définitif des exécutions extra-judiciaires et des purges opérées au sein de l’armée, dans les villes et villages de la vallée, est un impératif majeur qui exige un changement immédiat de paradigme. La banalisation de ce lourd passif est préjudiciable.

 

S’il est vrai qu’un bilan ne peut se limiter à vous faire porter les insuccès de vos prédécesseurs, il reste évident que vous ne pouvez pas ne pas assumer un héritage multidimensionnel ou s’entremêlent des problèmes graves d’ordre politique, économique, culturel, social, humain, juridique, éducatif auxquels des solutions doivent être trouvés.

 

Depuis bientôt 4 ans, votre gouvernement à perpétuer, grandeur nature, les injustices à tous les niveaux. Tous les Mauritaniens constatent que les statistiques sont effrayantes.

 

En effet, l’entêtement de l’élite dirigeante à ne faire figurer dans la nomenklatura étatique que des cadres majoritairement arabes, et de façon subsidiaire des cadres noirs acquis au système et servant de caution au sabotage et au sabordage des revendications légitimes des composantes noires, est un constat irréfragable d’une politique exclusivement arabe dans un pays où vivent Peulhs, soninkes, Hartines, wolofs et bambaras.

 

La Mauritanie que vous avez l’honneur de diriger, est obligé de participer à la stabilité du monde, au maintien de la paix et à la préservation de la dignité des Hommes.

 

Et pour jouer ce grand rôle, tout gouvernement mauritanien doit d’abord cultiver la paix et la justice a l’intérieur de ses frontières. N’est-ce pas une aberration que de vouloir l’épanouissement humain ailleurs quand des injustices structurelles sont enfouies dans le corpus politique du pays ?

 

Tous les peuples et nations qui se sont développés ont accepté d’opérer des sacrifices énormes et profonds pour forger un idéal. Ces nations ont accepté, à des moments décisifs de leurs trajectoires existentielles, d’opérer des transformations radicales.

 

Justement, en Mauritanie, nous avons besoin de ruptures et de changement à la place des discours et des politiques discriminatoires qui sont de nature à exacerber le fossé entre arabes et noirs. Mr le président, Ayez la générosité et le courage de satisfaire la DEMANDE SOCIALE et vous trouverez, avec l’aide d’Allah, des Mauritaniennes et des Mauritaniens qui vous tendrons la main.

 

Mr le Président, C’EST QUOI LA DEMANDE SOCIALE ET LES QUESTIONS QUI FONT DROIT DE VETO ? Il est triste d’entendre, par la voix de certains mauritaniens, pour qui la politique est un gagne-pain et une voie pour embellir une carrière professionnelle, réduire la demande sociale à des projets de développement le plus souvent mal pensés.

 

Répondre à la demande sociale en Mauritanie ne consiste pas à monter et exécuter des projets agricoles sans concertation avec des populations qui ont longtemps travaillé et façonné en fonction des écosystèmes aujourd’hui expropriés et charcutés ; Répondre à la demande sociale, ce n’est uniquement la réfection ou la construction d’hôpitaux ou le colmatage par du bêton des routes goudronnées ; Répondre à la demande sociale ne doit pas être une banalisation des assassinats de centaines de noirs de la vallée ; Ce n’est pas, non plus, l’application d’une politique éducative qui vise à achever les noirs en les transformant en arabes noirs ou en esclaves.

 

La demande sociale exige des préalables et une solennité accompagnée d’une mise en route de MESURES qui apaisent qui ramèneraient la confiance longtemps pour ne pas dire jamais existante. Pourquoi vous est-il difficile de prendre IMMEDIATEMENT des mesures d’apaisement ?

 

Pourquoi vous est-il difficile de prendre des engagements pour résoudre les contentieux et renoncer aux politiques discriminatoires aux conséquences imprévisibles ? Une fois, la volonté politique exprimée solennellement et les préalables définis, il sera NECESSAIRE de créer un CADRE DE CONCERTATION COLLECTIVE ET NATIONALE autour des problématiques qui sont essentielles et prioritaires.

 

Mr le Président

 

1. Des Mauritaniens exigent la LUMIERE et la JUSTICE sur les exécutions de leurs pères, mères, maris et fils. Leurs exigences ne sont pas synonymes de vengeance ni de haine. Au contraire, ces exigences sont pour établir la VERITE sur des assassinats, des tortures jusqu’à la mort et des arrestations arbitraires.

 

La lumière sur ces massives tueries est nécessaire car il n’est point admis d’ôter la vie de quelque personne que ce soit ; S’il est vrai que l’on doit condamner les vies innocentes abrégées à Gaza au point de faire leur deuil, a juste raison, il devrait en être davantage pour les Mauritaniens exécutés atrocement au sein de l’armée, dans l’administration et dans les villes et villages de la vallée.

 

A ce sujet, je vous invite à relire notre créateur qui dit : « C'est pourquoi nous avons prescrit pour les enfants d'Israël que quiconque tuerait une personne non coupable d'un meurtre ou d'une corruption sur la terre, C'est comme s'il avait tué tous les hommes". (Sourate al-Māida, Verset 32). Cette problématique est prioritaire et devrait occuper une place de choix.

 

2. L’école mauritanienne est une autre PRIORITE. Elle est devenue un incubateur de discorde et de haines. L’école mauritanienne est un énorme contentieux dont le règlement est un IMPERATIF MAJEUR. En effet, la remise en cause de l’impopulaire politique d’orientation éducative est une condition sine qua none a une cohabitation saine.

 

Evoquer notre école, c’est aller au cœur de l’un des grands errements de l’élite gouvernante depuis 1966 et qui s’est accentuée depuis lors ; La politique d’arabisation a été imposée uniquement dans le but d’exclure durablement les noirs de tous les secteurs de l’Etat. Avec la récente décision dite Loi d’orientation éducative, vous ouvrez la boite de Pandore et vous confirmez la volonté politique d’arabisation du pays.

 

Cette politique d’arabisation est suicidaire. Elle est à l’origine de la pourriture du système éducatif national et elle achève définitivement la mise à l’écart des noirs mauritaniens qui sont invités à accepter une aliénation ou un esclavagisme. Cet agenda est voué à l’échec car les noirs tiennent à leur humanité et à leurs identités.

 

Proposer de revisiter le système éducatif c’est permettre l’érection d’un Etat fort, de citoyens bien formés, conscients de leurs intérêts et de celui de leurs concitoyens. Remettre en cause votre Loi d’orientation, c’est aussi aider à l’émergence de citoyens qui se respectent et qui s’engagent pour un destin commun.

 

En un mot, c’est aider à l’érection d’une nation forte où les jeunes noirs et les jeunes arabes, futurs gestionnaires du pays, auront la conscience et le sens de l’histoire et du devoir citoyen chacun affirmant son identité dans la solidarité et le respect de l’autre. Eduquer c’est de prime abord, inculquer la tolérance, la solidarité, le mérite, l’amour et le respect.

 

Eduquer c’est aussi inculquer des principes et des valeurs qui proscrivent l’injustice, le mépris d’autrui. C’est dans l’éducation nationale et par elle que nous aurons la chance, avec l’aide d’Allah, de préparer nos enfants pour les mettre à l’abri du racisme et des extrémismes. Tel est le rôle du gouvernement. Des lors, comment comprendre que c’est le gouvernement lui-même qui érige des politiques qui charrient et enseignent tout le contraire ?

 

La question de l’Ecole mauritanienne est agaçante, gênante mais elle est incontournable en ce qu’elle est, à elle seule, UN INDICATEUR IRREFUTABLE des politiques d’exclusion des composantes noires. Evoquer le secteur de l’Education, c’est rappeler d’une part, la primauté de la dignité humaine, et d’autre part, rappeler l’exigence à respecter notre diversité culturelle et linguistique décrétée par Allah : « Ô hommes ! Nous vous avons créés d'un mâle et d'une femelle, et nous avons fait de vous des nations et des Tribus, pour que vous vous entreconnaissiez.

 

Le plus noble d'entre vous, auprès d'Allah, est le plus pieux. Allah est certes Omniscient et Grand- Connaisseur". (Al-Hujurat, les Appartements, Verset 13). Que nos concitoyens arabes aient une ambition de développer l’arabe me semble être naturel et légitime mais elle ne devrait aucunement se faire au détriment et dans une volonté de faire disparaitre ou d’aliéner les autres composantes.

 

3. La Constitution mauritanienne doit être révisée. LA REDACTION D’UNE NOUVELLE CONSTITUTION, fruit d’une réflexion collective est UNE CONDITION SINE QUA NONE.

 

La constitution actuelle est taillée sur mesure. Elle est taillée pour parachever le projet qui vise à bâtir une Mauritanie exclusivement arabe. Par conséquent, cette constitution n’est pas viable et doit être abolie pour lui substituer une constitution qui reconnaisse le caractère africain et arabe de notre pays. J’ai développé plus haut 3 problématiques qui me semblent être essentielles (Le passif humanitaire, la constitution et notre Ecole) pour illustrer.

 

Mais les problématiques sont nombreuses et sont d’ordre politique, économique, culturel, social qui devraient être étudiées de façon collective et auxquelles il ne serait pas saugrenu d’appliquer des mesures urgentes d’apaisement.

 

En effet, une DYNAMIQUE d’apaisement est plus que NECESSAIRE. Cette dynamique devrait englober une foultitude de questions pour lesquelles des mesures devraient être envisagées. Je m’en vais énumérer quelques-unes de ces mesures préalables, plus ou moins général, qui me semblent être faisables si tant est qu’une VOLONTE POLITQUE existe :

 

1. Des mesures dans l’audio-visuel avec notamment un rehaussement des volumes horaires de toutes les langues nationales dans les radios et TVs de l’état ;

 

2. Des mesures qui règlementeraient l’introduction et le rehaussement des volumes horaires dans les TVs et Radios privées ;

 

3. Des mesures urgentes et immédiates dans l’état civil qui aboliraient toutes les barrières qui empêchent les Mauritaniens recenser particulièrement les populations de la vallée ;v 4. Des mesures dans le foncier qui annuleraient toutes les attributions foncières faites il y’a au moins 30 ans par des préfets et gouverneurs qui abusaient de leurs autorités ;

 

5. Des mesures dans le secteur culturel et du patrimoine culturel ;

 

6. Des mesures pour annuler toutes les dettes indues au détriment des paysans des rizicultures ;

 

7. Des mesures de recrutements massifs dans les corps constitués (ENA, Ecole de Magistrature, Armée, Police, Douanes, Garde Nationale, Enseignement) pour réparer les injustices infligées aux jeunes noirs depuis au moins 3 décennies d’arabisation outrancière dont le seul objectif était de les exclure de la fonction publique.

 

8. Des mesures urgentes pour un déroulement correct des élections (Découpage électoral, processus électoral etc.).

 

En énumérant ces 8 mesures, je reconnais être loin de l’exhaustivité tellement l’éventail des problèmes est immense et les périls énormes. Evidemment d’autres mesures spécifiques et ciblées devraient être appliquées pour créer des conditions optimales pour une bonne cohabitation.

 

Mr le Président,

 

Je crois profondément, que la Mauritanie a besoin D’UN AUTRE DEPART QUI PASSERAIT PAR UNE CONSULTATION COLLECTIVE & INCLUSIVE POUR RESOUDRE AU PLUS VITE LES QUESTIONS NATIONALES. Ce sont les filles et les fils de la Mauritanie, sous l’impulsion d’un Etat qui DOIT assumer son rôle régalien, qui doivent se donner la main pour résoudre les innombrables et irréfragables contentieux qui les opposent. La Mauritanie est en crise et il est inconcevable qu’une omerta soit entretenue sur les questions qui nous enlisent.

 

Vous savez que toutes les instabilités et les crises politiques sont, à l’origine, le résultat d’anomalies et d’injustices conçues par les élites gouvernantes ; Anomalies et Injustices qui génèrent une impasse. Notre pays est bel et bien dans ce cas. Je vous exhorte d’agir avant qu’il ne soit trop tard.

 

Puisse Allah nous protéger et nous mettre sur les pas du Prophète Mohammad (PSL) qui a parfait sa mission. Puisse Allah faire de nous des Hommes qui respectent l’Islam et qui travaillent pour la paix et la justice entre les Mauritaniens.

 

Je vous remercie.

 

New-York le 19 FEVRIER 2024

ADAMA NGAIDE

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