Aucune période de transition, si longue soit-elle, ne saurait effacer ou affaiblir les liens profonds qui unissent nos deux peuples, rapprochés par la géographie et unis par l’histoire dans une fraternité et une solidarité peu communes, forgées au fil du temps, malgré les épreuves et les secousses.
Jamais, dans l’histoire de nos relations, un gouvernement n’a refusé l’accès aux pâturages aux éleveurs de l’autre. Jamais non plus, l’un n’a manqué de se tenir fermement aux côtés de l’autre face aux menaces communes ou aux dangers partagés. Cette constance a toujours incarné l’esprit de solidarité sincère qui caractérise nos peuples.
Pourtant, depuis l’enchaînement des crises politiques au Mali, marquées par des prises de pouvoir militaires et des transitions prolongées, les provocations à l’égard de la Mauritanie se sont multipliées, révélant une dérive préoccupante à mesure que les difficultés internes du régime malien s’intensifient.
Le président Assimi Goïta et ses compagnons n’ont, jusqu’ici, répondu ni à l’attitude compréhensive de la Mauritanie, ni à l’engagement constant de son président, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani. Ce dernier, par souci de respect mutuel, a toujours veillé à ce que le territoire mauritanien ne serve jamais de base à des actions susceptibles de nuire à la souveraineté malienne.
Bien plus, la Mauritanie a assumé des positions de principe, souvent à son propre détriment. Elle a refusé de s’aligner sur le blocus imposé au Mali, comme elle a décliné de suivre les sanctions décrétées par la CEDEAO. Cette fidélité à l’amitié entre nos peuples a entraîné un refroidissement de ses relations avec certaines puissances extérieures. Et pourtant, loin de se contenter d’un soutien symbolique, le président Ghazouani a pris l’initiative d’encourager certains partenaires au développement à contribuer au règlement de la dette énergétique du Mali, tandis que plusieurs missions officielles mauritaniennes ont été envoyées à Bamako, et que de nombreuses délégations maliennes ont été accueillies à Nouakchott dans un climat d’ouverture, de fraternité et de respect mutuel. Il n’est donc pas exagéré d’affirmer que la Mauritanie est l’un des pays les plus fréquemment visités par les ministres maliens.
Ce geste d’amitié n’a malheureusement rencontré, en retour, que froideur, mépris et provocations. Des citoyens mauritaniens, pacifiques et sans défense, ont été tués sur le territoire malien, dans des circonstances impliquant soit des éléments de l’armée malienne, soit des milices qui lui sont associées. D’autres ont été arrêtés, torturés ou humiliés, en violation flagrante des principes du droit international et des valeurs du bon voisinage.
À cela s’ajoutent des décisions unilatérales et injustes qui ciblent directement les Mauritaniens établis au Mali. L’interdiction récente faite à nos éleveurs d’entrer sur le territoire malien, ainsi que les restrictions drastiques imposées aux commerçants mauritaniens, frappent une communauté qui, depuis des décennies, participe activement à la vitalité économique malienne. Ces femmes et ces hommes ont, par leur présence, tissé des liens de paix et de fraternité, tout en contribuant au développement local. Les mesures prises contre eux pénalisent, en réalité, autant les Mauritaniens que les Maliens, car elles affaiblissent une économie déjà éprouvée et frappent injustement des milliers de petits investisseurs.
Les autorités maliennes doivent comprendre que la fermeture des frontières, l’expulsion arbitraire de ressortissants et la mise en œuvre de pratiques hostiles ne sont pas seulement rétrogrades : elles sont contraires à l’esprit de la région et à l’histoire qui nous unit. La Mauritanie, pour sa part, n’a jamais eu recours à de telles pratiques, et n’y aura jamais recours. Elle continuera, comme elle l’a toujours fait, d’accueillir tout citoyen malien résidant légalement, respectueux de ses lois et ne représentant aucun danger pour la sécurité nationale.
En Mauritanie, les ressortissants maliens jouissent de tous leurs droits, sans restriction. Ils participent librement à la vie économique, sociale et, parfois même, politique. Il n’est pas rare de les voir entretenir des relations ouvertes avec des formations de l’opposition, ce que bien peu de pays dans le monde toléreraient de la part d’étrangers. Cette générosité d’accueil repose sur la hauteur de vue et l’attachement profond aux valeurs d’équité du président Ghazouani.
La Mauritanie n’a jamais initié de provocation à l’égard du Mali, et elle ne tombera jamais dans une logique de confrontation. Toutefois, qu’il soit clairement compris que sa retenue ne doit pas être perçue comme une faiblesse. Son armée nationale, disciplinée, aguerrie et solidement équipée, est l’une des plus professionnelles de la région. Elle a, à elle seule, repoussé les groupes terroristes qui menacent l’ensemble du Sahel et a su maintenir ses frontières à l’abri de toute incursion — un exploit salué par la communauté internationale. Cette armée veille avec rigueur sur l’intégrité territoriale du pays, et aucune violation, aussi minime soit-elle, n’est tolérée. Les rares incidents survenus ont d’ailleurs donné lieu à des réponses claires, reçues sans équivoque.
C’est pourquoi nous en appelons à la lucidité des autorités maliennes. Votre pays traverse une phase difficile, marquée par de nombreux défis internes. Il serait à la fois injuste et dangereux d’y ajouter une tension inutile avec un voisin dont l’amitié, en période de crise, a toujours été loyale et constante. Il ne vous serait ni supportable, ni souhaitable, de faire face à l’inimitié d’un pays qui a toujours misé sur la paix et le dialogue.
La coupe est pleine, et les provocations ont franchi les limites. Il est temps de revenir à l’essentiel : le respect du voisinage, l’honneur des engagements historiques, et la sauvegarde des liens de fraternité.
Quant à ceux qui, dans l’ombre, vous poussent à prendre des décisions hostiles qu’ils n’ont jamais eu le courage d’assumer publiquement, qu’ils sachent que la Mauritanie est un État pleinement souverain, jaloux de son indépendance et maître de ses choix. Elle ne l’a jamais été, et ne sera jamais, une dépendance de quelque puissance ou intérêt que ce soit. Nul ne la manipulera, nul ne l’instrumentalisera. Ce que vous n’avez pas osé imposer directement, vous ne l’obtiendrez pas davantage par la provocation ou la pression indirecte.
Que la paix vous accompagne.
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